Toussaint Cartier, l’énigmatique ermite de Saint-Barnabé, et la pêche sur la côte de Gaspé

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Résumé

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Toussaint Cartier vécut seul sur l’île Saint-Barnabé, au large de Rimouski, entre 1728 et 1767. Cette vocation solitaire en plein siècle des Lumières constitue une énigme, dans la mesure où le pape Benoît XIV, son contemporain, appelait à excommunier de tels ermites qu’il assimilait à des « abeilles sans reine ». Deux ans après sa disparition, l’écrivaine britannique Frances Brooke fit de Toussaint Cartier un personnage de roman dans The History of Emily Montague (1769), en le représentant comme un veuf inconsolable, attendant la mort pour rejoindre sa bien-aimée dans l’au-delà. À cette version romanesque, s’opposa au XIX^e siècle un contre-récit catholique, imaginant un athlète de Dieu dont l’unique motivation était de « faire son salut ». La tradition orale contribua à perpétuer sa mémoire, au point que, de personnage de roman, l’ermite devint personnage de légende.Mais qu’en est-il du personnage historique ? Les archives et les témoignages conservés à son sujet sont à ce point laconiques qu’ils ne permettent ni de résoudre l’énigme de sa vocation ni d’éclairer son existence avant son arrivée à Rimouski. La découverte récente de nouveaux documents d’archives permet d’envisager que l’ermite ait été un marin originaire de Bretagne, pratiquant la pêche à la morue sur la côte de Gaspé. Cette hypothèse est corroborée par l’importance de la pêche dans l’entourage de l’ermite de Saint-Barnabé, notamment les témoins qui se portèrent garants de lui auprès des seigneurs de Rimouski en 1728 et en 1764. La généalogie a été d’une aide décisive pour reconstituer la parentèle du pêcheur breton et les bénéficiaires des revenus de la haute pêche à Rimouski au XVIII^e siècle.